Yawara!
Dessinateur : Naoki Urasawa
Editeur: Kana
Résumé :
Le tome 19 marque un tournant décisif dans l’histoire de la jeune judoka prodige. Yawara s’apprête à disputer son troisième match des Jeux Olympiques, face à la redoutable Klaus, une Allemande coriace. Mais sa concentration est mise à rude épreuve : l’absence de M. Matsuda, le journaliste qui l’a toujours soutenue, l’inquiète de plus en plus. Elle commence à mettre des mots sur ses sentiments, alors que lui est en pleine mission de sauvetage à Barcelone pour secourir une collègue prisonnière d’un réseau de proxénétisme.
En parallèle, la mystérieuse Marceau, judoka française à la progression fulgurante, impose son style sans faille sur le tatami. Yawara est troublée : Marceau prétend être entraînée par le père disparu de Yawara. Est-ce la vérité ? Est-il là, quelque part, à l’observer depuis les gradins ? Tandis que le doute l’envahit, c’est bien la pensée de M. Matsuda, et Fujiko, son amie fidèle, qui lui donneront la force de se recentrer avant l’affrontement tant attendu.
Au même moment, Shinnosuke, toujours aussi fuyant, tente d’échapper au piège tendu par Sayaka, bien décidée à le marier ! Un fil narratif secondaire qui apporte une touche d’humour bienvenu dans ce tome rempli de tension.
Le duel Yawara/Marceau est l’un des plus intenses de la série. Pour la première fois, Yawara doute sérieusement. Elle est poussée dans ses retranchements physiques et émotionnels, et ce combat lui apportera plus qu’une victoire sur le tatami. Il cristallise à la fois son évolution sportive et personnelle.
Avis :
Ce tome est une véritable montée en puissance émotionnelle. Selon moi, c’est l’un des meilleurs de toute la série. L’auteur y joue finement sur plusieurs niveaux : d’un côté l’action intense des combats, de l’autre les péripéties de Matsuda à Barcelone, qui ne sont pas sans rappeler un bon vieux polar. Ce découpage en parallèle fonctionne à merveille et permet de maintenir un rythme haletant tout au long du tome.
L’apparition du père de Yawara, que l’on attend depuis des dizaines de chapitres, crée une énorme attente… et pourtant, cette rencontre, qui aurait pu être un moment pivot, m’a laissée un peu sur ma faim. Trop brève, presque expédiée. Yawara n’exprime ni colère, ni trouble profond, ni réel soulagement. On aurait pu s’attendre à une vraie confrontation, après des années d’absence, des questions, des reproches… mais non. C’est presque traité comme un détail, alors que tout semblait tourner autour de cette intrigue. Dommage.
Au niveau graphique, Naoki Urasawa est, comme toujours, au sommet de son art. Les scènes de judo sont d’une intensité folle : chaque prise, chaque chute, chaque hésitation se lit dans le trait, nerveux, précis, vivant. Le contraste entre la tension des combats et la folie douce des intrigues secondaires (comme Shinnosuke poursuivi par Sayaka) est renforcé par des expressions de visage d’une justesse remarquable. L’édition de luxe, avec ses pages grand format et parfois en couleur, permet de savourer tout cela dans les meilleures conditions.
La narration est une grande réussite. L’auteur parvient à gérer une multitude de fils narratifs sans jamais perdre le lecteur. L’alternance entre l’arène, la fuite rocambolesque de Shinnosuke et le « thriller » barcelonais de Matsuda crée une tension constante et un vrai plaisir de lecture. Les dialogues sont justes, souvent drôles, parfois émouvants. Le tout s’enchaîne avec fluidité, sans temps mort.
En conclusion, le tome 19 de Yawara! allie puissance, humour et émotion. On sent que la fin approche, que tout s’accélère. Le combat contre Marceau restera sans doute l’un des plus marquants de la série, tant par son intensité que par ce qu’il révèle de l’évolution de Yawara. Dommage, toutefois, que la réapparition de son père – un point central de l’intrigue depuis le début – soit traitée de façon aussi secondaire. Cela n’enlève rien à la qualité générale de ces tomes, mais laisse un petit goût d’inachevé.